Carnet du petit Tom : Physique, biologie et évolution...

27 juin 2006

Le statut de la preuve...

En surfant sur la blogosphère et via Embruns, je suis tombé sur ce billet d'un professeur de maths américains (Polymath) qui donne plusieurs preuves amusantes de la fameuse égalité 0.999....=1 (avec un nombre infini de 9). A partir du moment où on accepte la convention de noter "suite infinie de 9" par "999...", cette égalité est tout à fait juste et notre ami blogger nous donne plusieurs preuves mathématiquement correctes. Rien de bien surprenant a priori; juste une curiosité mathématique basée sur une convention de notation.

Et pourtant... cela a suscité pas mal de réactions foudroyantes et très surprenantes de la part de son lectorat :

  • "You must be a public school teacher, and I fear for your students. You don't know enough math to teach it. Stop filling their heads with nonsense."



  • ".999... is clearly less than 1, but mathematics isn't advanced enough to handle infinity, so you can't prove it. My intuition isn't flawed, math is."


  • " 1 - .666... = .444..., but .999... - .666... = .333..., so 1 and .999... can't be equal."


Autrement dit, pêle-mêle, on commence tout d'abord par une insulte et une remise en cause des compétences scientifiques de notre ami, on continue par l'affirmation d'une intuition allant à l'encontre de ce résultat, supérieure à la science froide et détaillée, pour finir par la démonstration d'une pseudo faille qui n'existe que dans l'esprit du contradicteur incapable de faire une soustraction correcte. En somme certains préfèrent sortir des arguments spécieux et pseudo-philosophiques plutôt que d'accepter la démonstration correcte du fait mathématique qui les choque.

Une autre réaction intéressante :

  • I was going to post a rebuttal with complete proof from 2(two) ASU mathematicians (who both agree with me), but upon review of all your posts, I came to the ultimate conclusion that you don't need proof. You will go to your grave believing with the core of your being that .9999999... does, in your mind, equal 1. However wrong I, or anyone else may think you are will not matter. Trying to convince you otherwise is like trying to convince an atheist that God exists.

  • Comme le souligne très bien Polymath dans sa réponse, la science n'est pas une affaire de foi, seuls les faits comptent, et les mathématiques ne sont pas des opinions.


    Evidemment, tout cela m'a immédiatement fait penser aux réactions des partisans de l'"intelligent design" qui remettent régulièrement en cause les compétences scientifiques des biologistes, affirment l'existence d'évidences supérieures aux faits scientifiques démontrant la pertinence de leurs vues, pour finir par essayer de construire une science parallèle montrant les contradictions de la science officielle. Par extension, les "darwinistes" comme ils les appellent sont finalement accusés de dogmatisme, voire d'immoralité et d'obscurantisme. Cette "controverse" mathématique suscite donc exactement les mêmes réactions et contre-arguments que la théorie de l'evolution ! Quand je vois comment les maths (pourtant élémentaires ici) peuvent être contestées, j'ai l'impression que l'ID a plus que de beaux jours devant lui.

    Courage Polymath !

    23 juin 2006

    Youpi !

    Cette fois on y est en huitièmes !
    Bravo les Bleus, et sus à l'Espagne ! Zizou de retour va pouvoir écoeurer ses presque compatriotes du Real !
    Même si Libé joue encore les pisse-froid.... Pfff....

    Allez, ayons confiance. Il paraît qu'historiquement, à chaque fois que les Bleus sont sortis des poules dans une coupe du monde, ils sont allés au moins en demi-finale. De plus, l'Espagne sera favorite, aura la pression, et surtout l'Espagne a un double complexe : elle est régulièrement éliminée en huitièmes/quart et n'a jamais battu les Bleus en phase finale. Au contraire, les Bleus ont toujours remporté la compétition lorsqu'ils ont battus l'Espagne (bon, ce n'est vrai que sur deux Euros...). Un beau match en perspective mardi...

    Sinon, c'est un peu détente ce soir... Je viens de découvrir l'existence des fils RSS. Et même que mon blog en a un ! Je ne le savais pas ! Internet c'est dingue... Cela va m'éviter d'aller voir en permanence les blogs des autres pour savoir s'ils ont été mis à jour (clin d'oeil appuyé à Chofie... d'ailleurs j'attends avec impatience ta future surprise).

    20 juin 2006

    France / Etats-Unis : Allez !

    Avec la coupe du monde, des différences profondes dans la manière d'appréhender des événements similaires se révèlent dans la façon dont Français et Américains envisagent la suite de la compétition pour leurs équipes respectives. D'un côté, les Américains : un point en deux matches, une raclée prise d'entrée contre la République Tchèque, deux joueurs suspendus pour le prochain match, une victoire indispensable contre le Ghana (avec une bonne différence de buts). De l'autre la France : deux points en deux matches, des erreurs d'arbitrage en sa défaveur, deux joueurs suspendus pour le prochain match, une victoire indispensable contre le Togo (avec une bonne différence de buts).
    Deux situations quasiment identiques a priori. Et pourtant... Ici, les Américains y croient dur comme fer depuis le début de la compétition (vous vous rendez compte, ils ont été quart de finaliste en 2002, quel exploit extraordinaire ! ils peuvent le refaire). De l'autre, les Français, si j'en crois la presse et les diverses réactions de pseudosupporters, n'y croient plus du tout, critiquent à tout va (Libé a même prétendu que la France était quasi-éliminée, ce qui est presque de la desinformation), glosent sur les relations tendues de Domenech et Zidane, fustigent une équipe de "privilégiés", incapables de mouiller le maillot, dénoncent un jeu indigent (on n'a pas dû voir les mêmes matches alors, surtout la première mi-temps de France-Corée) et se réjouissent presque d'une débâcle annoncée voire souhaitée. Or, soyons sérieux cinq minutes : les chances de la France sont objectivement assez grandes, celles des US quasi-nulles. Il nous "suffit" de battre le Togo par deux buts d'écart, ce qui est difficile mais loin d'être exclu (souvenons-nous de la façon dont la Côte d'Ivoire, si brillante, avait été écrasée il y a moins d'un an par nos Bleus de retour). J'ai le sentiment qu'en toute objectivité, nos éditorialistes sportifs sont à côté de la plaque dans leur analyse, ce qui ne serait pas très grave si cet autodénigrement systématique n'avait pas l'air de peser de plus en plus sur nos joueurs, et pourrait amener effectivement au désastre anoncé.
    Je me pique un petit délire dans ce qui suit... En lisant les journaux et les commentateurs sportifs, je ne peux m'empêcher de penser à toute cette vague de déclinisme et d'autoflagellation caractéristique des éditoriaux français ces derniers mois. Qu'en est-il par exemple réellement de la situation économique française ? Est-elle aussi catastrophique qu'annoncée, comme celle de notre équipe de France ? La France est-elle un pays si horrible qu'on le dit ? Pour parler chiffres (critère suprême d'objectivité) est-ce si grave d'avoir 1000 milliards d'euros de dettes et une équipe de foot avec 31 ans de moyenne d'âge ? Bien souvent, les journalistes/éditorialistes spécialisés ont à peu près les mêmes relations avec leur domaine fétiche que nos consultants sportifs avec le foot (depuis l'observateur historique mais incompétent jusqu'à l'ancien personnage clé reconverti dans le journalisme). Et les commentaires sont identiques : il faut tout reconstruire, s'inspirer des autres pays, oublier le passé pour vivre dans la modernité, car notre pays va droit au mur sinon - sans compter l'ultra classique "c'était mieux avant" ou pire "cela fait X années qu'on a laissé la situation se dégrader" (X=20 en économie, 5 en foot). Les succès d'hier deviennent la preuve même de la soi-disant pourriture actuelle du système : champions du Monde et d'Europe de foot, nous n'avons prétendument pas su "évoluer", comme notre système économique par exemple, et nous sommes à la veille d'un effondrement généralisé. Tout le monde finit par adhérer à cette vision de la réalité; un tour sur la blogosphère vous révélera par exemple que les blogueurs réformistes-libéraux-anti-fonction-publique sont à peu près aussi nombreux que ceux qui réclament la tête de Zidane ou Domenech (et sont parfois une seule et même personne d'ailleurs !). L'analyse politique et économique a-t-elle déteint sur le foot, ou ne serions-nous plutôt pas des grincheux chroniques ? De ce côté de l'Atlantique au contraire, l'optimisme est de mise et généralisé, on croit dans les héros locaux (sportifs et économiques), et s'ils se plantent, ils feront mieux la prochaine fois. J'ai parfois l'impression que nos "leaders" d'opinion ont inventé une sorte d'anti-méthode Coué : surtout disons que nous sommes nuls, histoire d'être surs de le devenir...

    En tous cas et pour conclure, moi, j'y crois (peut-être encore naivement ) à cette équipe de France. Je sens bien un scénario à l'italienne : qualification laborieuse, matches tendus et serrés mais bon parcours au final. Trois mots donc pour finir : Allez les Bleus !!


    Ajout 22 Juin : apparemment, je ne suis pas le seul à penser cela...

    15 juin 2006

    Evolution et design

    L'un des buts avoués de Dembski, l'une des cautions scientifiques de l'Intelligent Design, est d'arriver à trouver un algorithme, une procédure permettant de déterminer si une structure biologique est d'origine aléatoire, ou au contraire, pensée et réalisée par un agent intelligent. Les Anglophones utilisent le terme "design" pour définir toute structure ayant effectivement une fonction : Dembski souhaite trouver comment distinguer un "design" d'origine intelligente d'un "design" naturel. Mais comme le précise Allen dans un billet récent, il y a un vrai problème à définir ce qu'est un "design". Je pense que ce problème est en partie d'origine purement linguistique. La traduction française de "dessein" a l'avantage d'être sans ambiguité : pour nous francophones au moins, le "design" est donc d'origine intelligente par définition, une structure est créée "à dessein". Donc, tout ce qui est "designé" est artificiel d'une certaine manière; si vous dites que les ailes des oiseaux ont été "désignées", vous serez immédiatement soupçonné de sympathie créationniste. On préférera donc le terme "d'adaptation" ou "d'évolution", soulignant bien que les ailes n'ont pas été conçues pour permettre aux oiseaux de voler, mais sont des traits biologiques sélectionnés. Comme le dit Allen :

    "No characteristics of living organisms can be shown to have come into being because they would eventually have that result"

    L'homme peut leur prêter une fonction a posteriori : par sa propre observation il projette une finalité à ces différents traits. Cela est très utile car cela permet d'expliciter effectivement les processus (genre "les oiseaux ont des ailes pour voler" ou "telle enzyme est chargée de digérer tel nutriment"), mais c'est très dangereux dans le cadre de ce débat théologico-philosophique, dans la mesure où l'utilisation de telles expressions fait croire à une conception pensée et rationnelle de ces différentes structures biologiques. Les ID ont alors l'avantage linguistique supplémentaire de pouvoir jouer là-dessus en mettant à toutes les sauces le terme "design".

    13 juin 2006

    Billet express

    Ouh la la... Entre le travail et la coupe du monde, dur dur en ce moment d'écrire sur mon blog... Quelques petits trucs qui m'ont étonné ces derniers jours :

    • un article de libé se fait l'écho d'une découverte tout à fait saisissante. A partir d'un certain âge, il semble que l'être humain ne parvient plus à entendre certaines fréquences sonores. Du coup, certains petits malins ont inventé un appareil destiné à émettre cette fréquence afin d'éloigner les jeunes délinquants (lamentable...). Mais d'autres encore plus malins ont détourné l'invention et ont fabriqué une sonnerie de téléphone portable à partir de cette fréquence. Désormais, à l'aide de cette sonnerie, il est donc possible de recevoir des SMS en plein cours sans que votre prof s'en aperçoive ! Vive le progrès... En attendant, petit sondage pour vérifier l'âge de votre oreille (à défaut de l'âge de vos artères) : la fameuse fréquence est audible ici, l'entendez-vous ? C'est mon cas, je suis un vrai djeun'z ! J'ai du mal à croire que certaines personnes ne l'entendent pas...

    • Attention, âmes sensibles et amis des animaux, abstenez-vous de lire la suite. Nature évoque cette semaine un problème tout à fait crucial pour les labos de biologie. Les progrès de la génétique exigent de faire des expériences sur l'animal, et en particulier sur les souris. Ainsi, au Royaume-Uni, en 2004, 2.4 millions de souris de laboratoires sont nées. Une fois l'expérience terminée, ces souris sont en fait purement et simplement euthanasiées. En ce moment, il y a apparemment un débat important pour savoir quelle est la procédure la plus "humaine" pour pratiquer cette euthanasie. Il y a deux techniques classiques : soit on brise le cou des souris, soit on les gaze au CO2. La première technique est rapide, mais demande doigté et dextérité, et peut donc parfois être très cruelle en cas de loupé. La seconde technique a l'air plus humaine, mais certains chercheurs ont fait des manips qui tendent à montrer que si le gazage ne provoque pas de douleur, il peut engendrer une sensation de suffocation très stressante et désagréable. Plusieurs alternatives sont envisagées : utiliser plutôt le monoxyde de carbone, voire l'argon. Un autre article propose même la décapitation comme méthode plus humaine, arguments à l'appui (une tête de rat devient anoxique en moins de trois secondes, la perte de consience est donc nécessairement antérieure)... Quoi qu'il en soit et comme le conclut l'article, c'est toujours moins cruel que l'utilisation usuelle des pièges à souris classiques. J'avoue que j'ai quand même du mal à m'imaginer euthanasier des souris ainsi... La biologie des mammifères, je crois que ce n'est pas fait pour moi !


    C'est tout pour aujourd'hui, et même après le match nul, je m'en tiens toujours à un bon gros ALLEZ LES BLEUS !!!

    07 juin 2006

    Gènes du développement : Urbilateria et segmentation



    La plupart des animaux supérieurs sont donc ségmentés. Cependant, rien de commun a priori entre les segments des insectes et notre colonne vertébrale. Ceci pose une question importante d'un point de vue de l'évolution : le dernier ancêtre commun des bilatériens (i.e. des animaux avec un plan de symétrie), appelé "Urbilateria", était-il segmenté ?
    Pendant longtemps, les spécialistes ont pensé que ce n'était pas le cas et que la "segmentation" était apparue indépendamment chez les vertébrés et les invertébrés. L'organisation en segments répétés ne serait que le résultat d'une convergence évolutionnaire.
    Le paysage a considérablement changé ces dernières années. Pourquié et ses collaborateurs ont tout d'abord découvert le mécanisme de la somitogenèse en regardant l'expression de l'homologue d'un gène capital de la segmentation de la drosophile. Réciproquement, on a également découvert que la segmentation des araignées était contrôlée par la voie Notch, cruciale pour la somitogenèse. Ainsi, les différents mécanismes de segmentation utilisent plus ou moins les mêmes protéines chez tous les bilatériens. Cela suggère évidemment que l'ancêtre commun de ces animaux non seulement possédait ces protéines, mais surtout était probablement lui aussi segmenté.
    Pourtant, de nombreuses questions demeurent... Ainsi, si les protéines sont conservées, les mécanismes de régulation et les liens entre les protéines sont totalement différents d'une espèce à l'autre. La magie de l'évolution est d'avoir réussi à recycler constamment ces mêmes protéines dans des processus très différents. Par exemple, la somitogenèse, reposant sur une croissance de l'embryon liée à une oscillation est très différente dans le principe à la segmentation de la mouche, où tous les segments apparaissent en même temps. Comment l'évolution a-t-elle (continument ?) modelé les interactions génétiques pour passer d'un processus à l'autre ? Si l'on parvient à comprendre dans le détail ces différentes transitions on aura fait un pas gigantesque dans la compréhension des mécanismes de l'évolution. Et c'est l'un des buts fixés par une discipline scientifique spécifique : la biologie du développement évolutionnaire (pour faire hype, on dit Evo-Devo en anglais...).

    Illustration : reconsruction de Kimberella, l'un des bilateriens le plus anciens. Le gros problèmes concernant Urbilateria est qu'on ne trouvera vraisemblablement jamais son fossile... Source : université UC Davis.

    J-2

    Bonne surprise ce matin : j'ai appris qu'ABC allait diffuser les matches. Et je capte ABC ! Youpi ! (Bon, en même temps je pense ne regarder qu'une mi-temps car je ne peux pas prendre des pauses déjeuner de deux heures... et puis je me contenterai bien sûr des matches des Bleus...).
    Cet après-midi avait lieu France-Chine. Cissé s'est apparemment brisé la jambe. C'est horrible ! J'étais contrarié tout l'après-midi. Qui pour le remplacer ? Je sens bien que notre sélectionneur va nous jouer un petit tour : il paraît que Viera est très mal en point, je le vois bien appeler un "renfort" de ce côté-là... Pourquoi pas Pires ? Cela ferait plaisir à certaines blondes de ma connaissance - je dis ça juste pour la bonne bouche car je n'y crois pas un seul instant !
    En attendant, la blogosphère bruisse déjà autour de l'événement. Pour les nostalgiques, butygoal est fait pour vous (attention, n'abusez pas des hymnes de l'équipe de France, je sors d'une nuit avec "Viva les Bleus" dans la tête !). Je rêve d'y voir bientôt des extraits du fameux France-Allemagne de 82, qualifié par certains de "match du siècle" même si je suis bien trop jeune pour m'en souvenir. A l'époque, les Bleus étaient de glorieux et attachants losers, un peu comme les Pays-Bas aujourd'hui en fait ... Certains blogs se sont créés pour l'occasion. Enfin, pour les amateurs de geste technique, une vidéo intéressante comparant Zidane et Ronaldinho. Cette vidéo prétend que l'élève Ronnie va dépasser le maître Zizou. Que nenni ! N'importe quoi ! Je garderai toujours en mémoire ce pénalty ridicule de Ronnie tiré face à Landreau...

    02 juin 2006

    J-7


    Je m'étais juré de me pondérer, d'éviter de trop aborder le sujet sur mon blog. Je rongeais mon frein, me disant qu'il fallait rester sérieux; ne pas en parler, ou alors essayer d'aborder les choses d'un point de vue détaché, voire scientifique. Avoir des angles d'attaques originaux, et ne surtout pas virer dans la beauferie ni dans le chauvinisme pour ne pas faire fuir mon lectorat restreint. Mais que voulez-vous, je suis incorrigible, je n'y tiens plus, car dans une semaine commence l'événement attendu par une bonne moitié de l'humanité (dont votre serviteur) : LA COUPE DU MONDE !!!!

    Ce n'est pas une sinécure de suivre le foot aux Etats-Unis. Car j'en suis désormais convaincu : les Américains n'aiment pas le sport (ils préfèrent le frisbee et le base-ball). Le foot ici est un sport essentiellement féminin, donc pas assez viril pour être apprécié des masses. Normal me direz-vous, après tout, quoi de plus raffiné qu'un dribble de Ribéry, une roulette de Zidane ou un centre dans les tribunes de Cissé ? Heureusement pour moi, les Etats-unis sont une terre d'immigration, et plus particulièrement d'immigration sud-américaine... De plus, les hispaniques, comme on les appelle ici n'ont en général pas les moyens de se payer le câble très onéreux. Donc la plupart des chaînes hertziennes ici émettent en Espagnol (oui, c'est hallucinant, mais c'est comme cela). Et, chance pour moi, diffusent donc les matches de foot. Ainsi, j'ai eu la joie et la surprise de pouvoir regarder France-Mexique la semaine dernière ! Youpi !

    Bon, rien ne me garantit toutefois que je pourrai suivre les matches des Bleus. Peut-être la télévision locale ne diffusera-t-elle que les matches du Mexique. Fausse joie ce matin : la BBC diffusera tous les matches sur Internet mais malheureusement, cette diffusion sera limitée au Royaume-Uni. Je croise les doigts néanmoins : je suis sûr que quelqu'un trouvera bien un moyen de détourner le flux...

    En attendant, je suis avec passion les dernières péripéties de l'équipe de France. L'affaire SFR, la sélection de Ribéry, la colère de Coupet, la forme moyenne de Zidane, les matches amicaux encourageants... Je puise mes informations sur le site des cahiers du football, dont est issue cette charmante vignette de "Scarface". Je me remets à rêver ! D'autant qu'une étude récente tout à fait scientifique montre que les Bleus ont 19.6 % d'atteindre la finale et 11.1 % de chances de la remporter. Ils sont les deuxième favoris, juste derrière le Brésil. Allez, moi, j'y crois, comme à chaque compétition internationale, je vous livre mon pronostic : victoire finale de la France ! (je sais, on me dit toujours que je donne le même pronostic, mais en même temps, j'ai commencé les pronostics en 98 et jusqu'à maintenant, j'ai eu raison une fois sur deux ! Qui peut en dire autant ?)

    01 juin 2006

    Gènes du développement : la somitogenèse


    Retour à New York et suite de ma série sur les gènes du développement...

    Aujourd'hui, je vais essayer de vous expliquer un mécanisme tout à fait fascinant : celui de la formation de la colonne vertébrale. En termes biologiques, les vertèbres sont dérivés de motifs précurseurs appelés "somites", d'où le terme de "somitogenèse" (mais pour faire simple, on considérera qu'une somite est l'équivalent d'une vertèbre dans la suite).

    Alors, la vertèbre, comment ça marche ? En fait, les embryons des vertébrés poussent par la queue. Les somites se forment alors une par une lors de cette croissance. Edit 8 Juin : Sur le site de Cell, un petit film pour vous montrer la dynamique de la somitogenèse. A priori il semble accessible librement. J'ai retiré la photo car je ne suis pas du tout sûr d'avoir le droit de la mettre sur mon blog... J'ai remis une image tirée du film : la queue de l'embryon est à gauche, la tête à droite. On voit les somites en formation.


    Le processus de formation des somites n'est pas encore très bien compris en détail, mais le modèle qui tient la route actuellement est appelé "Clock and Wavefront model" et a été proposé dès les années 70 par Cooke et Zeemann. Pourquié et ses collaborateurs ont été les premiers à mettre en évidence la validité de ce modèle dans un papier absolument remarquable publié en 97 (Palmeirim et al. Cell. 1997 Nov 28;91(5):639-48).

    Décrivons donc ce fameux modèle, qui repose en fait sur la théorie des "catastrophes". Dans la queue de l'embryon, il y a une horloge moléculaire ("Clock"). Cette horloge est composée de deux parties : un mécanisme génétique (engrenages de la montre) va contrôler l'expression de certaine protéines qui donnent effectivement "l'heure" à l'organisme (aiguilles de la montre). Maintenant, que se passe-t-il si vous donnez un grand coup de marteau à votre montre ? Là est la catastrophe ! Vous risquez de briser le mécanisme (les engrenages) et les aiguilles vont alors s'arrêter, si bien que votre montre va donner pour l'éternité l'heure à laquelle le coup de marteau a été donné. C'est exactement ce qui se produit dans la somitogenèse : à une distance bien précise de l'extrémité de la queue de l'embryon, l'organisme met un coup de marteau sur l'horloge moléculaire et bloque ainsi les aiguilles de cette horloge. Mais pendant ce temps l'embryon croît par la queue, et dans les tissus nouvellement formés l'horloge continue de tourner. Du fait de la croissance, ces tissus finissent eux aussi par recevoir le coup de marteau, et l'heure indiquée par ces tissus sera en gros l'heure au moment de leur formation plus le temps de croissance nécessaire pour arriver dans la région "coup de marteau". L'oscillation temporelle (horloge) est alors en quelque sorte gelée en oscillation spatiale ( par le coup de marteau qui arrête les aiguilles de la montre), et les motifs ainsi obtenus servent de base à la formation des somites.