Petite boutique des horreurs : le cancer canin parasite
Le sarcome de Sticker est un cancer très particulier, spécifique aux chiens. Ce cancer se développe quelques mois avant de régresser naturellement. Rarement mortel, ne développant pas de métastases, il possède néanmoins cette caractéristique rare et effrayante pour les cancers de pouvoir se transmettre d'un individu à l'autre (par l'intermédiaire de relations sexuelles le plus souvent !). Récemment, une équipe anglaise dirigée par Robin Weiss a mené une étude génétique de ce cancer, et les résultats et implications théoriques et thérapeutiques de cette étude sont totalement incroyables.
Weiss et sont équipe ont étudié le génome des cellules cancereuses issus de différents animaux. Ils se sont alors aperçus que ces cellules cancéreuses n'étaient pas des cellules appartenant aux animaux malades. Au contraire, elles partagent toutes un même patrimoine génétique. Autrement dit, toutes les cellules cancéreuses de tous les chiens atteints sont apparentées ! Ce cancer semble donc se comporter davantage comme un parasite, pouvant sauter d'un animal à l'autre et ainsi se transmettre.
Pourtant, ces cellules cancéreuses ressemblent à s'y méprendre à des cellules de chiens. En poursuivant l'analyse, les chercheurs ont pu montrer que ce parasite-cancer était apparenté au génome du loup (même espèce que le chien domestique mais un peu différent génétiquement). Encore plus étonnant : l'analyse des données génétiques montre que ce parasite est apparu très très récemment (la borne supérieure est 2500 ans, et le parasite est probablement beaucoup plus jeune).
Voilà donc le tableau qui se dessine selon moi (NB : à partir d'ici ce ne sont que de pures spéculations personnelles) : il y a environ 1000 ans, une cellule d'un chien-loup est devenue cancéreuse et a proliféré. Seulement, ce cancer n'était pas très virulent et n'a pas tué son hôte. On ne sait comment, il a acquis probablement au même moment la capacité de tromper le système immunitaire du chien et la faculté de se transmettre par simple contact d'un individu à l'autre, ce qui lui a permis de se reproduire et de se développer, et donc de continuer à évoluer. En quelque sorte, ce cancer est donc une nouvelle espèce vivante (car pouvant se reproduire), et vivant dans un environnement naturel particulier, le corps du chien ! Les implications d'un point de vue évolutif sont alors colossales. Premièrement, on a l'exemple d'un événement récent de spéciation. Deuxièmement, on peut peut-être étudier en "temps réel" l'évolution de cet organisme, ou du moins le début de son évolution depuis la spéciation. Troisièmement, on a probablement un exemple ici d'une cellule somatique différenciée, intégrée dans un organisme, qui a "déévolué" vers une cellule non spécialisée, pouvant se reproduire et s'implanter dans un nouvel hôte. Les perspectives de recherche dans le domaine de l'évolution, pour l'étude "écologique" des relations hôte-parasite mais aussi et surtout pour la thérapie des cancers, me paraissent extraordinaires !
Références :
L'article de l'équipe de Weiss : Murgia et al, Cell, 2006 Aug 11;126(3):477-87.
Un lien vers un article du Washington Post relatant cette découverte
Weiss et sont équipe ont étudié le génome des cellules cancereuses issus de différents animaux. Ils se sont alors aperçus que ces cellules cancéreuses n'étaient pas des cellules appartenant aux animaux malades. Au contraire, elles partagent toutes un même patrimoine génétique. Autrement dit, toutes les cellules cancéreuses de tous les chiens atteints sont apparentées ! Ce cancer semble donc se comporter davantage comme un parasite, pouvant sauter d'un animal à l'autre et ainsi se transmettre.
Pourtant, ces cellules cancéreuses ressemblent à s'y méprendre à des cellules de chiens. En poursuivant l'analyse, les chercheurs ont pu montrer que ce parasite-cancer était apparenté au génome du loup (même espèce que le chien domestique mais un peu différent génétiquement). Encore plus étonnant : l'analyse des données génétiques montre que ce parasite est apparu très très récemment (la borne supérieure est 2500 ans, et le parasite est probablement beaucoup plus jeune).
Voilà donc le tableau qui se dessine selon moi (NB : à partir d'ici ce ne sont que de pures spéculations personnelles) : il y a environ 1000 ans, une cellule d'un chien-loup est devenue cancéreuse et a proliféré. Seulement, ce cancer n'était pas très virulent et n'a pas tué son hôte. On ne sait comment, il a acquis probablement au même moment la capacité de tromper le système immunitaire du chien et la faculté de se transmettre par simple contact d'un individu à l'autre, ce qui lui a permis de se reproduire et de se développer, et donc de continuer à évoluer. En quelque sorte, ce cancer est donc une nouvelle espèce vivante (car pouvant se reproduire), et vivant dans un environnement naturel particulier, le corps du chien ! Les implications d'un point de vue évolutif sont alors colossales. Premièrement, on a l'exemple d'un événement récent de spéciation. Deuxièmement, on peut peut-être étudier en "temps réel" l'évolution de cet organisme, ou du moins le début de son évolution depuis la spéciation. Troisièmement, on a probablement un exemple ici d'une cellule somatique différenciée, intégrée dans un organisme, qui a "déévolué" vers une cellule non spécialisée, pouvant se reproduire et s'implanter dans un nouvel hôte. Les perspectives de recherche dans le domaine de l'évolution, pour l'étude "écologique" des relations hôte-parasite mais aussi et surtout pour la thérapie des cancers, me paraissent extraordinaires !
Références :
L'article de l'équipe de Weiss : Murgia et al, Cell, 2006 Aug 11;126(3):477-87.
Un lien vers un article du Washington Post relatant cette découverte
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire