Carnet du petit Tom : Physique, biologie et évolution...

15 novembre 2006

Néandertal séquencé

C'est la grande nouvelle de la semaine : deux papiers paraissant simultanément dans Nature et Science contiennent les premiers résultats sur un séquençage (partiel pour l'instant) de Néandertal - voir références en fin de billet.

Avant de disserter sur les résultats du séquençage, soulignons tout d'abord la performance technique. Séquencer un ancien génome n'est pas un exercice très facile. Les cas de "contamination" sont fréquents, l'exemple le plus fameux étant le supposé ADN des insectes pris dans l'ambre qui s'est par la suite révélé être tout à fait moderne (ce qui ne nous a pas empêchés de fantasmer sur Jurassic Park). Le recueil de prélèvements ressemble maintenant à une opération chirurgicale, avec gants et combinaisons étanches. C'est d'autant plus difficile dans le cas présent qu'on s'attend légitimement à trouver beaucoup de points communs entre les ADN de sapiens et de Néandertal, donc il est difficile d'exclure des faux a posteriori. Les chercheurs ont notamment utilisé une nouvelle technique au nom barbare de "pyroséquençage" pour séquencer rapidement en parallèle afin d'avoir un maximum d'information pour vérifier les données.

Les résultats sont intéressants. L'équipe de Rubin (Noonan et al.) a séquencé 65000 bases, a trouvé 502 bases mutées à la fois chez sapiens et Néandertal (en comparant au chimpanzé comme outgroup), dont 27 sont spécifiques à sapiens. Green et al. ont analysé près d'un million de bases, ont trouvé 10167 bases différentes par rapport aux chimpanzés, dont 434 uniques à Sapiens. Sapiens et Néandertal partagent en fait 99.5% de leur génome.

Que nous dit maintenant ce séquençage sur une possible hybridation entre les deux espèces homo ? L'équipe de Green/Pääbo a comparé une bibliothèque d'allèles de sapiens (des SNPs, i.e. Single Nucleotide Polymorphism) à ceux de Néandertal. 30% de ces SNPs sont présents dans Néanderthal mais absents chez le chimpanzé. C'est beaucoup trop pour des espèces séparées par 500 000 ans d'évolution, et, même si on est encore loin d'avoir une preuve absolue, cela suggère effectivement que Sapiens et Néanderthal ont pu s'hybrider. Comme les chromosomes X des Néandertal ont l'air particulièrement divergents, l'hypothèse serait que des mâles sapiens ont pu avoir des enfants avec des femelles Néandertal. Qui sait, peut-être Eve (la dernière femelle dont nous descendons tous) était-elle une Néandertale ;) ...

PS : l'article de Lahn dont j'avais parlé dans un billet précédent à propos du gène microcephalin de sapiens pouvant venir de l'hybridation avec Néandertal et ayant été spécifiquement sélectionné vient de paraître sur le site web de PNAS.


Références :

Green et al., Nature 444, 330-336 (16 November 2006)
Noonan, J. P. et al. Science 314, 1113–1118 (2006).
Evans et al., PNAS, 2006 Nov 7; [Epub ahead of print]

4 commentaires:

Matthieu a dit…

hé, c'est sympa ca !

2012 : neandertal park
2030-2050 : mouvement des droits civiques des neandertalensis
2075 : premier président neandertal des Etats-Unis (l'Islande, la Suède et la Nouvelle-Zelande ayant précédés de 10 bonnes années).

:-D

Tom Roud a dit…

De toutes façons, j'ai été convaincu par l'article de Lahn, nous sommes tous des Néandertals... J'essaie par quelques billets distillés ces dernières semaines de convertir les lecteurs de ce blog, mais je ne suis pas sûr d'avoir beaucoup de fidèles pour l'instant ;) .

Anonyme a dit…

ton blog est génial, un de mes favoris, surtout continues de poster régulièrement !

un lecteur fidèle :D

Tom Roud a dit…

Cher lecteur fidèle,
merci de ton soutien, il est apprécié ;) !